IIème Dimanche de carême
IIème Dimanche de Carême
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Textes du jour ici:
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Sermon
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Transfiguration.
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Sur le sommet d’une montagne de Palestine, peut-être le Thabor, Notre-Seigneur est en prière, avec trois de ses apôtres, les trois privilégiés. Et tout à coup, devant les regards éblouis, il apparaît glorifié. Lui, dont aucune auréole, dans la vie quotidienne, ne signalait la divinité, est soudain illuminé d’une lumière mystérieuse ; lui, qui portait l’humble costume des paysans Galiléens, apparaît maintenant revêtu des vêtements d’une blancheur éclatante ; lui, qui avait tant d’ennemis parmi les chefs du peuple et dont l’action était contrecarrée âprement, est entouré de Moïse et d’Élie, les grands personnages de l’histoire d’Israël qui viennent lui rendre hommage, tandis qu’une voix du ciel, la voix de Dieu lui-même, proclame solennellement : « Celui-ci est mon Fils bien-Aimé. »
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Nous comprenons la surprise joyeuse des apôtres et leur enthousiasme à la vue de ce Jésus qui, dans l’existence journalière, était si simple, si familier, si pareil aux autres hommes, et qui, brusquement, révèle sa gloire. Sans doute, auparavant, ils croyaient que le Maître était bien plus qu’un homme, qu’il était mystérieusement le Fils de Dieu. Mais dans la vie ordinaire et son accoutumance, ils étaient portés à l’oublier. Faute d’être assez animés par cette foi, ils laissaient inexploité le trésor incomparable. Maintenant qu’ils découvrent de nouveau, dans un éclat de gloire, le Christ, Fils unique du Père, Sauveur promis à Israël, ils découvrent en même temps leur privilège inouï de vivre avec Jésus et dans son amitié, de pouvoir, à chaque instant, rencontrer son regard, l’entendre, lui parler, lui demander sa force et son pardon. Dans la plénitude de joie qu’ils éprouvent, ils voudraient éterniser cette minute exceptionnelle : « Seigneur, restons ici ! » Rêve chimérique. L’homme ne vit pas sur le Thabor et dans l’extase ; la plaine le réclame pour le combat et le travail. Mais dorénavant toute leur existence, qui restera dans le détail des heures, monotone, pénible, en grisaille, apparaîtra merveilleusement transfiguré par cette minute de lumière inoubliable.
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La foi chrétienne est, pour nous, cette lumière qui doit transfigurer notre existence. Tant que nous regardons notre vie du regard seulement humain, elle nous paraît généralement maussade, à certaines heures absurde et cruelle. Nous sommes aux prises avec mille difficultés. Nous avons l’impression d’être roulés par la grande vague des évènements qui nous dépassent et dont nous sommes le jouet dérisoire. Notre travail quotidien peut nous paraître fastidieux et, à la longue, exaspérant. Ceux qui nous entourent, même ceux que nous aimons, peuvent compliquer encore notre épreuve. Dieu lui-même peut nous sembler lointain, absent des prières où nous cherchons à le rejoindre, étrangement neutre et indifférent au drame de notre vie. Mais si nous éclairons cette vie humaine par les vérités de la foi, alors tout est changé, tout se transfigure, comme un paysage morose s’anime, se colore et se met à sourire à la lumière du soleil. Car la foi nous permet de faire cette découverte sensationnelle que Dieu est invisible, mais n’est pas lointain, qu’il est présent partout et en nous-mêmes et qu’il nous cerne de sa tendresse. Nous découvrons que Dieu, apparemment silencieux et détaché, nous aime d’un amour passionné et qu’il s’occupe du détail de nos vies dans sa Providence minutieuse ; que nous avons des preuves de sa présence et de son amour, que le Christ habite près de nous dans la sainte Eucharistie. Nous découvrons que, par la grâce sanctifiante, nous sommes les vrais riches, possédant la richesse même et la vie de Dieu. Nous découvrons que nos démarches quotidiennes, aussi insignifiantes, à première vue, que l’agitation des fourmis dans la fourmilière, que notre travail le plus banal peut avoir des retentissements éternels en nous méritant un ciel plus beau. Nous découvrons que nos souffrances – révoltantes aussi longtemps qu’elles semblent absurdes – peuvent devenir utilisables et fécondes, si nous les unissons aux souffrances du Christ ; et que la vie, même déplaisante, est orientée vers le bonheur que le Père céleste prépare à ses fils. Et n’y a-t-il pas, dans ces vérités de la foi, le soleil capable d’empourprer de couleur chaude et de lumière amicale tout ce qu’il y avait de maussade dans la suite des jours terrestres ?
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Seulement, nous oublions, en général, d’y penser. Nous manquons, en pratique, de foi ou de cet esprit de foi qu’on a appelé la présence d’esprit de la foi. Toute cette réalité invisible nous semble inexistante ou falote… Évidemment, nous ne pouvons voir de nos yeux, toucher de nos mains le monde spirituel. Dieu, l’âme, le ciel, la grâce, ni l’analyse chimique, ni les rayons X, ni les explorations de la stratosphère ne peuvent les atteindre. Et il faut ajouter que les instants où Dieu, par une grâce spéciale, devient « sensible au cœur », où le monde invisible nous apparaît plus solide et plus vrai que les choses matérielles, ce ne sont dans nos vies que des minutes brèves : La joie de la Transfiguration, pour les apôtres, a été passagère. S’imaginer que les Saints vivaient toujours en extase et avec le ciel ouvert devant eux est une niaiserie. Pour eux comme pour nous la vie terrestre a été une épreuve et une obscurité. Reste que, pour nous comme pour eux, la foi doit être une lumière. Et puisque la foi dépend de la grâce et de notre bonne volonté, puisque la grâce nous est toujours offerte, il dépend finalement de nous que notre foi chrétienne devienne plus vive et plus éclairante. Faisons cet effort. Car il serait vraiment dommage de végéter entre quatre murs ténébreux, comme des prisonniers, alors qu’on peut marcher sous le grand soleil de Dieu. Il serait dommage de rester près du Sauveur sans vivre avec lui.
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Il n’y a peut-être pas de prière plus belle et plus profonde que cette phrase inventée par un paysan Galiléen qui implorait la puissance du Christ : « Je crois, Seigneur, mais aidez mon incrédulité ! » Seigneur, nous aussi nous croyons et cependant nous ne croyons pas. Nous avons la foi, mais avec cette foi imparfaite, nous demeurons, pour ainsi dire, des incroyants. Aidez-nous, Seigneur, et réveillez notre foi somnolente, pour que notre existence monotone et éprouvée soit toute entière illuminée par votre présence, en attendant le jour éternel où nous vous contemplerons dans la gloire. Amen !
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Bon et saint dimanche de carême !
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