XIV Dimanche après la pentecôte.
QUATORZIEME DIMANCHE APRES LA PENTECÔTE
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Textes du jour ici:
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Sermon
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Le Maître argumente.
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C’est un fait remarquable d’après l’Évangile, que le Maître, dans son enseignement, néglige d’ordinaire les arguments et les preuves. Ayant conscience d’être lui-même la Vérité, il affirme, assuré que son affirmation doit suffire à convaincre.
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Il n’est que plus significatif de constater à cette méthode une exception : dans le Sermon sur la montage, quand il veut nous inspirer la confiance envers le Père céleste, le Christ raisonne et démontre. Dieu, qui vous a donné la vie, vous donnera aussi bien de quoi l’entretenir. Il s’occupe avec sollicitude des oiseaux et des fleurs, à plus forte raison s’occupe t-il de vous, ses fils très chers. Et puis, en dépit de vos activités fiévreuses, il n’y a tant de choses où vous ne pouvez rien : il faut bien lui faire confiance.
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On dirait que Jésus se heurte en nous à de sourdes résistances et qu’il doit tout mettre en œuvre pour les vaincre. Et de fait, l’homme répugne à s’abandonner à Dieu, quand la confiance paraîtrait si naturelle à l’égard de ce Dieu qui sait tout, qui peut tout et qui nous aime. Mais non, Dieu obtiendra de l’homme, assez facilement, une générosité même coûteuse, parfois héroïque ; il a toutes les peines du monde à obtenir la confiance, la remise en soi, l’abandon, le repos de l’enfant qui dort en sécurité entre les bras de sa mère. L’homme est un puits profond d’inquiétude, un monstre d’inquiétude : peut-être parce que la vie lui a enseigné la méfiance ; peut-être parce qu’il y a en lui des abîmes d’orgueil et qu’il veut avoir le sentiment de choisir sa route et de gouverner sa marche, l’impression de construire lui-même son existence.
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L’attitude chrétienne est toute autre : « Ne soyez pas inquiets, dit Jésus, le Père sait très bien tout ce dont vous avez besoin. Confiance ! »
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Encore faut-il comprendre exactement ce qui nous est demandé par Dieu et ce qu’il ne nous demande pas. Les considérations sur les oiseaux qui ne sèment ni ne récoltent pour se nourrir, sur les lis des champs qui ne filent et ne tissent pas leur parure sont une simple parabole : méfions-nous des contre-sens. Il ne s’agit pas de nous laisser vivre en paresseux, en écervelés, en imprévoyants. Nous ne sommes ni des lis, ni des oiseaux, mais des hommes. Ce n’est pas pour rien que Dieu nous a donné une raison, une volonté, une liberté. Nous devons gagner notre pain, organiser notre vie, équilibrer un budget, préparer un avenir à ceux que Dieu nous confie. Et voilà qui réclame activité ingénieuse, prévoyance et même calculs attentifs.
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Mais ce qu’il faut exclure, en écoutant la leçon des passereaux et des fleurs, c’est l’inquiétude rongeuse et l’anxiété qui serait une sorte de négation de la Providence ; c’est la fièvre de gagner de l’argent qui nous rendrait esclaves de l’argent ; c’est le sentiment orgueilleux et illusoire que nous créons nous-mêmes par nos propres forces, ce qui nous ferait oublier le Créateur.
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Voilà d’ailleurs pourquoi les moments de grande crise où nous sommes dépassés par des événements gigantesques, les tempêtes où pilote, boussole et gouvernail sont inefficaces pour diriger le navire, peuvent être des heures privilégiées de grâce : car nous sommes alors contraints de déposer à la fois l’orgueil de l’homme qui voudrait compter uniquement sur soi-même et l’inquiétude anxieuse de celui qui s’imagine qu’une maladresse de sa part amènera la catastrophe, ce double fardeau d’orgueil et d’inquiétude qui n’est sans doute qu’un seul et même fardeau.
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Des heures graves, mais aussi de toutes les autres heures moins dramatiques de nos existences, fortifions en nous la conviction que la toute-puissance de Dieu n’est jamais en chômage, que son regard sur nous n’est jamais distrait. Souvenons-nous de son amour de Père, où se retrouvent, mais portées à l’infini, toutes les délicatesses de l’amour maternel, puisque, dans le prophète Isaïe, Dieu déclare à son peuple : « Une femme oublierait-elle son petit ? N’aurait-elle pas pitié de celui qu’elle a enfanté ? Eh bien ! quand même les mères oublieraient, moi je ne t’oublierai jamais ! Ton nom est gravé sur mes mains. » Souvenons-nous des paroles du Christ lui-même et de ses raisonnements victorieux : « Vous qui êtes méchants, vous êtes bons pour vos petits. Et vous croyez que le Père qui est toute bonté ne vous donnera pas à vous tout ce qu’il faut pour votre bonheur vrai ? »
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Le Christ, toutefois, n’a pas voulu se contenter d’arguments mêmes irréfutables : il nous a laissé un exemple dont l’héroïsme doit emporter nos dernières hésitations. Sur le Golgotha du vendredi saint où il agonisait lentement au milieu des ténèbres qui n’étaient que le symbole d’une nuit plus lourde pesant sur son âme, à l’heure où il semblait oublié de ce Père qui nourrit les oiseaux et revêt les lis de splendeur, puisque sur la Croix il était nu et pour calmer sa soif il ne trouvait que le vinaigre offert par les bourreaux, au moment où il ressentait une déréliction qui le faisait crier : « Mon Dieu, pourquoi m’avez-vous abandonné ? » Jésus, le Maître du Sermon sur la montagne, devenu la victime du Calvaire, nous a livré l’enseignement suprême. Abandonné de tous et, semblerait-il, du ciel même, il s’abandonne à Dieu ; car l’abandon est le plus magnifique hommage qu’on puisse rendre à Dieu, Créateur et Père. Il dit en inclinant la tête pour mourir : « Mon Père, entre vos mains, je remets ma vie. »
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Prions : Ô Jésus, Par votre agonie sur la Croix, vous avez voulu nous mériter douloureusement la force de surmonter nos doutes, nos défiances, nos tentations de désespoir. Au nom de cette Agonie, faites-nous comprendre que la confiance est la plus belle des adorations et enseignez-nous à répéter dans toutes les circonstances de notre vie ce qui fut votre dernière parole : « Mon Père, entre vos mains, je m’abandonne. »
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+ Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il !
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Bon dimanche à tous, dans la grâce et l’amour du Seigneur !
En Jésus par Marie !
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